Windcoop veut révolutionner le transport maritime des containers
- petitprincebandol
- 27 avr.
- 4 min de lecture

"On sera l'anti-modèle des monstres d'aujourd'hui" : le premier porte-containers à voile au monde entre en construction
Le premier porte-container à voile au monde reliera Marseille à Madagascar
A contre-courant du gigantisme actuel, le premier porte-containers à voile au monde sera petit et sous pavillon français. Sa production débute actuellement en Turquie, il reliera Marseille à Madagascar.
"Vous avez vu le dernier porte-conteneurs géant mis à l'eau en Chine ? Un monstre de quatre cents mètres de long, cent mille chevaux de puissance moteur, 250 tonnes de carburant consommées chaque jour... C'est exactement ce qu'on ne veut plus voir, c'est le sens de notre engagement".
Nils Joyeux est un militant de la décarbonation. Mais plutôt que d'entrer dans un combat idéologique contre le gigantisme d'armateurs toujours plus gourmands, CMA CGM et Maersk en tête, il a décidé de les concurrencer, en développant le transport maritime propre, à taille humaine.
"On veut être les anti-modèles des monstres d'aujourd'hui"
Nils Joyeux, directeur général coopérative Windcoop
Tout premier porte-conteneurs à voiles
S'il n'a pas encore de nom, le tout premier porte-conteneurs à voiles au monde vient d'entrer en phase de construction. Il effectuera sa première rotation depuis Marseille vers un port de Madagascar "à l'été 2027" confirme le directeur général de la jeune compagnie maritime bretonne Windcoop installée à Lorient.
Long de 91,3 mètres, le navire pourra transporter jusqu'à 210 conteneurs soit environ 2 500 tonnes de marchandises. C'est cent fois moins que les porte-conteneurs géants d'aujourd'hui. "Petit, mais pas ridicule" ose Nils Joyeux. Sa vitesse de pointe atteindra dix nœuds, soit 19 km/heure, moitié moins que les transporteurs traditionnels. "Le choix de la sobriété énergétique plutôt que de la célérité" justifie le responsable de Windcoop. Selon lui le navire à voiles devrait permettre 90% d'économies de carburant. "Le moteur diesel MGO embarqué ne prend le relais qu'en cas de pétole, pour assurer la continuité de la navigation".
Des "voiles" révolutionnaires
Conçues par la startup de Saint-Nazaire CWS, les six "voiles" qui seront installées sur le trois-mâts sont la botte secrète de ce navire zéro émission. Produites en alliage de fibre de verre, carbone et acier, leur rigidité et leur forme originale leur permettent de générer davantage de portances que les voiles tissées traditionnelles. "Elles ont la forme des gâches de flipper" s'amuse Nils Joyeux.
Six rotations par an
Dès 2027, le porte-conteneurs à voiles de Windcoop effectuera une rotation Marseille-Madagascar tous les deux mois. "On espère monter très vite à une rotation mensuelle si la demande est au rendez-vous" s'aventure le directeur général de la compagnie. Un rythme qui nécessiterait alors la construction d'un deuxième navire.
Des clients actionnaires et éthiques
L'avenir est entre les mains des clients qui sont aussi les actionnaires : le projet n'a pu voir le jour que grâce à l'investissement financier d'importateurs en France de produits malgaches : les épices d'Arcadie dans le Gard, les gousses de vanille Prova à Montreuil, le cacao des chocolats Valrhona dans la Drôme. Un transitaire malgache est également au tour de table.
"Avec nos clients et nos sociétaires, nous sommes tous un peu idéalistes."
Nils Joyeux, directeur général Windcoop
Des acteurs engagés dans les produits équitables et le développement durable, qui acceptent de payer un peu plus cher pour le transport de leur conteneur. Soit 4 200 euros la traversée quand le marché est plutôt autour de 3 000. "C'est le prix du pavillon français, de nos six marins qui seront mieux payés et qui auront des congés" justifie Nils Joyeux. Coût garanti, puisqu'il évite les fluctuations du pétrole.
Même temps de trajet
Plus cher, mais pas plus long. La tortue à voiles dépassera les lièvres carbonés en proposant une liaison directe sans étapes, une première. De plus, les grues de bord embarquées garantiront au navire une autonomie totale pour ses opérations de chargement et de déchargement dans des ports secondaires malgaches rarement desservis.
Construit en Turquie
Windcoop a confié la construction de son navire à RMK Marine, un chantier naval turc installé à Tuzla.
Nils Joyeux explique : "c'est un des rares constructeurs à se positionner sur ce créneau des embarcations zéro émission ; alors que l'innovation fait encore peur à pas mal pas mal de chantiers navals, ancrés dans une logique carbonée et le gigantisme, eux cherchent à innover". Un créneau à ne pas déserter. Les projets se multiplient autour des cargos à voiles. Selon une étude de l’association spécialisée Wind Ship, jusqu’à 40 000 navires pourraient être équipés d’une propulsion par le vent d’ici à 2050. En France, le Neoliner de la société nantaise Neoline fait figure de pionnier avec sa prochaine rotation entre le Havre et Philadelphie, via Saint-Pierre et Miquelon.
Financement participatif et militant
Pour boucler le budget total de 30.5 millions d'euros qui a permis de lancer la construction, Windcoop a pu compter sur près de sept millions d'euros de participation citoyenne. "C'est mon voisin, c'est ma mère, ou même vous" s'amuse son directeur général.
1 650 sociétaires-donateurs, convaincus par la force de la coopération pour faire évoluer l'économie, ont pris part à la levée de fonds participative lancée commencée en 2022. Et toujours en place sur un site de crowdfunding.
"La coopérative, c'est notre conception militante pour remettre l'économie entre les mains des citoyens."
Nils Joyeux, directeur général Windcoop
Nils Joyeux explique le principe de la coopérative militante appliquée au transport maritime.
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